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INTERNATIONAL

COP30 à Belém : une révolution des énergies renouvelables face à une crise de volonté politique


Alwihda Info | Par Olivier Noudjalbaye Dedingar, Expert-consultant international, humanitaire et journaliste indépendant. - 9 Novembre 2025


La 30e Conférence des Nations-Unies sur les changements climatiques (COP30) se tiendra à Belém, au Brésil, du 10 au 21 novembre 2025.


Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, au Sommet des dirigeants de Belém. Photo : Kiara Worth | ONU Climat
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, au Sommet des dirigeants de Belém. Photo : Kiara Worth | ONU Climat
Réunissant des négociateurs de près de 200 pays, ainsi que des dizaines de milliers de dirigeants, scientifiques, militants et innovateurs du monde des affaires, ce Sommet marque un tournant décisif dix ans après l'Accord de Paris. Organisée à l'embouchure de l'Amazone, la conférence est présentée par la présidence brésilienne comme la « COP de la mise en œuvre », passant des promesses à des actions concrètes et tangibles.

L'objectif principal est d'amorcer une « décennie d'accélération et de concrétisation » afin de maintenir le réchauffement climatique à 1,5 °C. L'ordre du jour est chargé, mais s'articulera autour de trois axes essentiels : la finalisation d'un nouvel objectif de financement mondial, l'ouverture d'une nouvelle ère pour la protection des forêts et l'adoption d'une nouvelle génération de contributions nationales ambitieuses au climat (CDN).

Sommet préparatoire des dirigeants
Afin de donner un élan aux deux semaines de négociations, l'ONU a convoqué le Sommet mondial des dirigeants pour l'action climatique à Belém, quelques jours seulement avant le lancement officiel. L'ouverture du Sommet a été marquée par un message d'optimisme économique profond, les dirigeants affirmant que la situation financière et technologique s'était radicalement inversée.

Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a déclaré sans équivoque que le monde était en pleine « révolution des énergies renouvelables ». « L'ère des énergies fossiles touche à sa fin », a-t-il affirmé. « L'avenir des énergies propres se dessine. »

Cette affirmation ne reposait pas sur l'espoir, mais sur des données concrètes datant de 2024. Dans une remarquable convergence de messages, M. Guterres et le Secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques, Simon Stiell, ont tous deux mis en avant les faits économiques :

● Un marché en plein essor : les investisseurs ont injecté 2 000 milliards de dollars dans les énergies propres l'an dernier, un chiffre, comme l'a souligné M. Guterres, supérieur de 800 milliards de dollars à celui investi dans les énergies fossiles.
● Domination du marché : Un chiffre impressionnant : 90 % de la nouvelle capacité de production d’électricité installée dans le monde en 2024 proviendrait des énergies renouvelables.
● Coût et emplois : L’énergie solaire et éolienne sont désormais les sources d’électricité les moins chères « presque partout », et créent trois fois plus d’emplois que les énergies fossiles.

« L’énergie propre l’emporte sur le plan du prix, de la performance et du potentiel », a affirmé M. Guterres, soulignant qu’elle redessine la géopolitique en garantissant la sécurité énergétique et la stabilité des prix. Simon Stiell a abondé dans ce sens, insistant sur le fait que la réponse mondiale au changement climatique, bien qu’incomplète, a « déjà infléchi la trajectoire du réchauffement climatique ».

Le défi, comme l’ont souligné les deux dirigeants, n’est plus d’ordre technologique, mais de rapidité et d’équité. « Les plans et les financements climatiques », a déclaré M. Stiell, « sont l’étincelle qui peut accélérer l’action, stimulant la croissance verte et la résilience de chaque nation. »

Un paysage politique fracturé
Cette analyse économique lucide risque de se heurter de plein fouet à un paysage politique fracturé, la COP30 s'ouvrant avec l'absence notable des dirigeants de plusieurs des plus grandes économies mondiales, dont les États-Unis, la Chine, l'Inde et la Russie.

L'absence du président américain Donald Trump, en particulier, jettera sans aucun doute une ombre sur les débats. Ayant récemment qualifié le changement climatique de « plus grande supercherie jamais perpétrée contre le monde » et rejeté le « concept mondialiste » d'action climatique, sa position sera certainement au cœur des discussions et des frustrations.

Le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva, dont le pays est hôte , a mis en garde contre les « forces extrémistes qui fabriquent de fausses informations ». Les dirigeants de la Colombie et du Chili ont été plus directs, qualifiant le président américain de « menteur », pour avoir rejeté les données scientifiques établies.

Cette crise diplomatique est peut-être le mieux résumée par le Premier ministre britannique, Sir Keir Starmer. Dans un moment de franchise brutale, il a reconnu l'affaiblissement du soutien politique à la cause. Le changement climatique, a-t-il noté, avait été un sujet d'unité tant au niveau international qu'au Royaume-Uni, « mais aujourd'hui, malheureusement, ce consensus a disparu ».

Ce consensus fragmenté rend l'objectif principal du Sommet, à savoir amener les pays à soumettre des plans de réduction des émissions plus ambitieux, extrêmement difficile à atteindre. Le point clé de l'ordre du jour de la COP30 est la « Feuille de route Bakou-Belém », un plan visant à porter le financement climatique de 300 milliards de dollars à 1 300 milliards de dollars par an d'ici 2035. Comme l'a décrit Simon Stiell, il s'agit d'un « intérêt partagé, et non de charité, d'un investissement dans la stabilité et la prospérité ».

Pourtant, un incident dramatique, survenu à la veille des négociations, a mis en lumière le profond fossé entre les discours et la réalité. Le Brésil, pays hôte, avait défendu avec conviction un programme phare de 125 milliards de dollars, le « Fonds pour les forêts tropicales éternelles », destiné à protéger les grandes forêts pluviales du monde. Ce plan reposait sur la levée de 25 milliards de dollars de fonds publics auprès des pays développés. Le Royaume-Uni, fortement impliqué dans la conception du fonds, était considéré comme un acteur essentiel.

À la surprise générale, le Royaume-Uni s'est retiré du fonds à la dernière minute. Cette décision a été qualifiée de « coup dur » pour le Brésil, et des sources ont rapporté que le gouvernement de Brasília était « furieux ».

Points clés de l'ordre du jour de la COP30
Au-delà des négociations de haut niveau, les négociateurs de près de 200 pays vont désormais se réunir pour des sessions techniques approfondies. Le programme de la conférence est un véritable labyrinthe d'instances : la trentième session de la Conférence des Parties (COP 30), la septième session de l'Accord de Paris (CMA 7) et les soixante-troisièmes sessions des organes subsidiaires chargés de fournir un avis scientifique (SBSTA 63) et de mettre en œuvre (SBI 63).

Leur mandat portera sur plusieurs domaines clés :
● Financement : Il s’agit incontestablement du point central. Au-delà de l’objectif de 1 300 milliards de dollars, les discussions porteront sur le déblocage des fonds attendus depuis longtemps pour l’adaptation et, surtout, sur le Fonds pour les pertes et dommages.
● Atténuation et CDN : La majorité des pays n’ont pas soumis de nouveaux plans climatiques 2030 plus ambitieux, comme l’exige la loi. Un objectif clé de la COP30 est de remédier à cette situation et d’obtenir des résultats concrets.
● Transition juste : Les discussions de haut niveau porteront sur la protection des travailleurs et des communautés pendant la transition énergétique, une priorité essentielle soulignée par António Guterres, le Secrétaire général de l’ONU.
● Nouvelles demandes : Pour la première fois, les dirigeants sont tenus de prendre en compte les nouvelles demandes énergétiques massives, notamment celles liées à l’intelligence artificielle, et de veiller à ce que la croissance soit satisfaite par une énergie propre, et non par de nouvelles énergies fossiles.
●Transparence : Les pays doivent progresser sur les nouveaux « rapports de transparence biennaux » (RTB), le mécanisme conçu pour tenir les pays responsables de leurs engagements.

Alors que les négociateurs de près de 200 pays s'installent à Belém pour deux semaines de travaux techniques, la 30e Conférence des Nations-Unies sur les changements climatiques (COP30), est marquée par un paradoxe frappant. La « révolution des énergies renouvelables » a fourni les outils techniques et économiques nécessaires pour remporter la lutte contre le changement climatique, un fait mis en avant par les dirigeants de l'ONU. Pourtant, cet optimisme est fragile, confronté à une réalité de volonté politique fragmentée, d'absences de personnalités importantes et d'une méfiance croissante envers le financement.

La portée symbolique de cette réunion en Amazonie est indéniable, mais l'issue reste incertaine. Le défi de la COP30 est de savoir si la « feuille de route Bakou-Belém » pour le financement et l'impulsion urgente donnée à de nouvelles contributions déterminées au niveau national (CDN) ambitieuses, peuvent combler le fossé entre ce qui est économiquement possible et ce qui est politiquement acceptable. Les deux prochaines semaines seront déterminantes pour savoir si le monde peut véritablement entamer la « décennie d'accélération » dont il a si désespérément besoin.

Le président brésilien Lula a mis en garde contre les « forces extrémistes », lors de son discours devant les dirigeants du monde, au Sommet mondial sur le climat. Photo : Pablo Porciuncula/AFP
Le président brésilien Lula a mis en garde contre les « forces extrémistes », lors de son discours devant les dirigeants du monde, au Sommet mondial sur le climat. Photo : Pablo Porciuncula/AFP

Le secrétaire américain à l'Énergie, Chris Wright, s'exprimant vendredi lors de la Conférence de l'Atlantique, a condamné la COP30, Sommet environnemental qu'il a qualifié de néfaste et malavisé. Photo : Petros Giannakouris
Le secrétaire américain à l'Énergie, Chris Wright, s'exprimant vendredi lors de la Conférence de l'Atlantique, a condamné la COP30, Sommet environnemental qu'il a qualifié de néfaste et malavisé. Photo : Petros Giannakouris



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